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Lecture : La Fracture Identitaire, Ivan Rioufol, Fayard, 2007
Numéro 8 - Avril 2008 page 205

 

par Bat Ye’or

Historienne, écrivain, auteur de Juifs et chrétiens sous l’islam face au danger intégriste, Berg international éditeurs, 2005.

 

Dans La Fracture Identitaire, Ivan Rioufol dresse un tableau réaliste et sans concessions de ce qu’il nomme le délitement de la France et ses causes. C’est un plaidoyer urgent pour le rétablissement d’une cohésion sociale héritée de l’histoire et une mise en garde contre les déstructurations du pays. Dans les fractures identitaires culturelles et sociales, l’auteur décèle les traumatismes d’une nation qui se désagrège. Aussi se propose-t-il de tirer les consciences de leur engourdissement et de dénoncer « l’instrumentalisation des naïvetés » responsable de cette situation. Il craint que l’accessoire et l’anecdote ne masquent les enjeux prioritaires de notre époque : la libanisation de l’Europe et singulièrement de la France.

La France État-nation se suicide-t-elle ? Allons-nous vers une guerre civile entre, d’une part, les partisans d’une dissolution de l’identité et de la culture nationales afin d’intégrer les immigrants réticents à abandonner les leurs – et, d’autre part, les partisans d’une cohésion fondée sur la fidélité aux valeurs essentielles du pays ? Le sursaut de ces derniers fit échouer le 29 mars 2005 le projet de Constitution européenne qui envisageait une Europe « sans frontières ni racines, c’est-à-dire sans géographie ni histoire », une Europe amibe, polymorphe et visqueuse.

Rioufol détecte les séismes qui déchirent le corps national, dans des institutions telles que l’école, par exemple, qui bâtit la dépersonnalisation de l’individu par la destruction de ses repères historiques et culturels. L’auteur se livre à une analyse exhaustive de « ce champ de ruines » qu’est devenue la scolarisation, socle de l’avenir d’un pays et dont la dislocation préfigure déjà l’instabilité du futur. Les causes de cette « catastrophe » résident dans la politisation de la culture, le relativisme des valeurs permettant l’islamisation des écoles par l’adoption de principes hostiles à la mixité, à la laïcité et à l’objectivité de l’enseignement. Rioufol nous démontre que cette évolution que l’on détecte à des degrés divers dans tous les pays de l’Union européenne, est soutenue par les représentants même de l’État. Cette situation se propage à tous les niveaux européens par des procédés insidieux tels que la désinformation calomnieuse et la culpabilisation unilatérale.

Chaque chapitre examine les divers ressorts psychosociaux activant la nécrose des valeurs nationales et de l’État-nation. L’auteur dénonce, notamment, l’instrumentalisation perverse d’une culpabilisation unilatérale relative à l’esclavage ou à la colonisation de pays musulmans, deux politiques essentielles au jihad perpétré sur des populations juives et chrétiennes à une échelle démultipliée sur trois continents et treize siècles mais qui n’évoquent cependant aucun regret. L’occultation de cette réalité entraîne le déni des conflits idéologiques entre Islam et Chrétienté et par conséquent l’impossibilité de traiter ces problèmes autrement que par une auto-flagellation européenne unilatérale.

L’auteur analyse les mécanismes de la désinformation véhiculés par les médias et les tabous masquant l’extension de l’immigration musulmane. Il cite l’opinion de nombreux démographes dénonçant les mensonges sur les flux migratoires et la dissimulation délibérée des chiffres réels. Les accommodements, la peur, l’introduction rampante de pratiques islamiques telles que la polygamie, la ségrégation féminine, les restrictions à la liberté d’opinion et de culte, l’explosion de l’antisémitisme révèlent les modifications en profondeur des sociétés européennes qui, par osmose migratoire, acquièrent des composantes islamiques.

Ce tour d’horizon de la situation en France pourrait s’appliquer à toute l’Union européenne dont la vision idéologique détermine l’harmonisation des politiques envers les pays musulmans sur le plan domestique de l’immigration et du multiculturalisme – et au niveau des politiques étrangères de soutien aux Palestiniens, de diffamation d’Israël et des États-Unis. Le travail de sape des identités nationales et culturelles européennes s’intègrent dans la politique de l’UE visant à désenclaver l’Europe de son histoire, de sa résistance à l’islam et de ses racines religieuses liées au judaïsme. La boulimie de son expansion territoriale qui l’amena au XIXe siècle à construire dans l’aventure coloniale, la modernisation de l’Afrique et de l’Asie, évolue actuellement en une autodissolution dans la mondialisation et l’auto-gérance pratiquée par des ensembles de réseaux inaccessibles aux citoyens. C’est à l’immigration dont Rioufol nous révèle les modalités, qu’est dévolue la mission civilisatrice et régénératrice de la nouvelle Europe. Cette immigration acquiert ainsi le rôle rédempteur attribué précédemment au prolétariat. Ciment de la fusion des peuples par le multiculturalisme elle représente l’antidote à la guerre par l’abandon des souverainetés nationales dans l’édification d’Eurabia, ce nouveau continent détaché de ses racines judéo-chrétiennes. Dans les derniers chapitres, Rioufol suggère des démarches pour sauver « la nation suicidaire ». Ce livre tonique écrit à un moment charnière devrait réveiller les consciences.

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