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B L O G   de   Shmuel   Trigano


Un cautère sur une jambe de bois

Shmuel Trigano Editorial sur Radio J du 25 décembre 2009

La création d’un super préfet chargé de centraliser l’observation de l’antisémitisme et du racisme et leur répression part d’une bonne intention et pourrait être efficace. Néanmoins ce nouveau dispositif s’appuie sur une analyse stratégique défaillante qui risque d’isoler encore plus les Juifs en n’identifiant pas exactement le problème.

On sait déjà que certains milieux de l’antiracisme sont eux- mêmes la source d’un antisémitisme virulent. On sait que les agents de la lutte contre l’islamophobie se comptent parmi eux. On sait que les agents de la lutte contre l’islamophobie se comptent parmi eux. Il y a un fait d’évidence à reconnaître : c’est dans le courant du multiculturalisme, qui aurait dû être le plus ouvert à la différence juive, le milieu qui prend fait et cause pour les minorités victimes, qu’est né et s’est développé ce que l’on a appelé le « nouvel antisémitisme ». Sa caractéristique la plus forte, c’est sa forme antisioniste, la haine du peuple juif coulée dans la haine d’Israël.

Toutes sortes d’études l’ont démontré (1). L’antisionisme n’est pas la critique de la politique d’un gouvernement israélien mais la critique de l’existence même d’Israël et de tout ce qui s’y rattache. En décrétant que les Juifs n’ont pas droit à l’autodétermination (Etat), parce qu’ils ne sont pas un peuple, ils critiquent le principe même de l’existence de communautés juives dans la diaspora (qualifiées de lobby), qu’elles s’identifient ou pas au sionisme. C’est une idéologie, dont la finalité ne peut être que l’extermination des Israéliens, cachée sous le nom de « Palestine laïque et démocratique ».

Qu’on ne nous raconte pas d’histoires car l’antisionisme a une histoire. Il n’est pas né avec la guerre des 6 jours et « l’occupation de territoires » mais dans le communisme soviétique et parmi ses alliés dans les années 1930-1950. Il est né une deuxième fois dans le monde arabe d’avant la création de l’Etat d’Israël et, sur la base d’une responsabilité collective, a expulsé ou exclus en masse les Juifs qui y vivaient et qui n’étaient pas alors des Israéliens mais des Juifs, persécutés sous l’accusation de sionisme.

Tout le problème en France et en Europe, c’est que l’antisionisme est florissant dans les médias et l’opinion publique, au point d’être tenu pour un discours de vérité. Les médias, les débats, la société civile en sont contaminés. Cela se manifeste par une obsession d’Israël permanente, un rendu inexact ou disproportionné des faits, une mauvaise foi systématique, un narratif pervers qui se recommande de la mémoire de la Shoa pour fustiger la barbarie des Juifs. Parfois, les médias jouent même la provocation. Depuis 10 ans, tout ce dispositif a été démontré par A + B. Une telle ambiance ne peut que susciter et encourager une animosité diffuse envers les Juifs.

Alors ce qui risque de se passer, c’est que l’on condamne vigoureusement l’antisémitisme, alors qu’il continuera de prospérer sous sa forme antisioniste. C’est déjà bien mais, dans ce cas là, la société montrera qu’elle est prête à conforter les Juifs quand ils sont des victimes mais pas à tout faire pour éviter qu’ils ne le deviennent. Un cautère sur une jambe de bois.

Note :
1 - Cf. Notre analyse au colloque de l’UPJF du 13 décembre 2009


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